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Page:Cortés - Lettres à Charles Quint, trad. Charnay, 1896.djvu/330

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la ville ; cinq autres Indiens qu’on m’envoyait de Médellin et de la ville Espiritu Santo les accompagnaient ; j’eus le plus grand plaisir d’apprendre que tout allait bien dans ces parages, quoiqu’on ne me dit rien du commissaire, ni du comptable qui n’étaient pas encore arrivés à Mexico. Après le départ des Indiens et des Espagnols qui me précédaient, je me mis en route avec tous mes gens et passai la nuit dans la forêt ; le lendemain vers les midi, j’atteignis les premières maisons des champs de la province d’Acalan, et j’entrai bientôt dans le premier village qui se nommait Tizatepetl, où nous trouvâmes tous les habitants dans leurs maisons, fort tranquilles et empressés à nous fournir des vivres pour les hommes et chevaux et dont nous avions tous le plus grand besoin.

Je me reposai six jours dans ce village, où je reçus la visite d’un jeune homme de belle prestance accompagné d’une suite nombreuse, qui me dit être le fils du cacique ; il m’apportait de l’or, des poules et mettait sa personne et sa province au service de Votre Majesté. Il me dit que son père était mort : je lui en exprimai tous mes regrets, encore que je n’en crusse rien ; je lui fis présent d’un collier de perles de Flandres que j’avais au cou, ce dont il fut très flatté. Il resta deux jours près de moi.

Un autre Indien de ce village qui s’en prétendait le cacique, me dit qu’il possédait un autre village près de là, plus important, où je trouverais de meilleurs quartiers et des vivres en plus grande abondance ; il m’invitait à m’y installer parce que j’y serais beaucoup mieux. J’acceptai ; j’envoyai ouvrir la route, je fis lever le camp et nous allâmes à ce village qui se trouvait à cinq lieues du premier, où les habitants nous attendaient en toute sécurité. Ils avaient préparé, pour nous recevoir, tout un côté du village qui est fort beau et qui s’appelle Teutiaccaa. Il possédait de superbes temples ; deux surtout où l’on nous avait logés, et d’où nous jetâmes les idoles au dehors, ce qui ne parut pas les beaucoup affecter, car je leur avais déjà fait sentir l’erreur dans laquelle ils croupissaient ; je leur avais dit qu’il n’avait qu’un dieu créateur de tout ce qui existe ; j’y ajoutai une foule de choses, mais je m’adressai principalement au cacique que je m’efforçais de convertir.