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Page:Cortés - Lettres à Charles Quint, trad. Charnay, 1896.djvu/332

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Je le priai d’aller chercher son père et de me l’amener. Ils vinrent tous deux le lendemain et je les reçus avec le plus grand plaisir : le seigneur s’excusa de n’être pas venu plus tôt, sur le besoin qu’il avait de savoir d’abord ce que je voulais, mais qu’il désirait beaucoup me voir. Il avoua qu’il avait voulu me détourner du chemin des villages, mais que maintenant, il me priait de me rendre à la ville où il résidait, parce que j’y serais mieux pourvu de toutes choses qu’ailleurs. Aussitôt il commanda l’ouverture d’un chemin fort large pour m’y conduire ; en attendant, il resta près de moi. Le lendemain, nous partîmes tous les deux ; je lui fis donner l’un de mes chevaux et il se montra tout fier d’entrer au petit galop dans sa capitale qui s’appelle Izancanac, grande ville, pleine de temples et située sur la rive d’un grand estuaire qui s’étend jusqu’aux frontières de Tabasco et de Xicalanco.

Quelques habitants avaient abandonné leurs maisons, mais la plupart étaient occupées. Nous eûmes là, des vivres en abondance, et le seigneur, quoique ayant son palais, voulut rester avec moi. Pendant mon séjour dans le village, il me parla souvent des Espagnols que j’allais retrouver et me traça sur une étoffe de coton la route que je devais suivre ; il me donna, sans que je le lui demandasse, de l’or et des femmes, tandis que j’en ai demandé à d’autres qui m’ont refusé.

Il nous fallait passer un estuaire précédé d’un marais ; le seigneur d’Izancanac fit jeter un pont sur le marais et, pour l’estuaire, il nous donna des canoas en nombre suffisant pour le traverser ; il fournit des guides et une pirogue à l’Espagnol qui m’avait apporté des lettres de Santisteban ainsi qu’aux Indiens de Mexico qui retournaient à Tabasco et à Xicalanco.

Je donnai à l’Espagnol des lettres pour mes lieutenants et je lui en donnai d’autres pour les caravelles que j’avais à Tabasco, lettres dans lesquelles je dirais aux Espagnols chargés des vivres, ce qu’ils auraient à faire. Ces divers courriers expédiés, je fis présent à ce seigneur de divers bijoux qu’il parut apprécier, et laissant derrière moi cette population paisible et satisfaite, je quittai le village le premier dimanche du carême de l’année 1525. Ce jour-là, nous ne fournîmes qu’une