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Page:Cortés - Lettres à Charles Quint, trad. Charnay, 1896.djvu/336

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nous retarder, et qu’ils étaient arrivés sans avoir été signalés, jusqu’aux premières cultures de la province, où ils avaient aperçu des Indiens et qu’ils étaient revenus.

Je me réjouis fort de cette nouvelle et j’envoyai en avant six piétons agiles accompagnés d’Indiens, afin de s’emparer de toutes personnes qu’ils rencontreraient ; de sorte que nous arrivions dans le village sans être signalés et que nous puissions surprendre les habitants avant qu’ils eussent le temps de brûler leur village et de s’enfuir comme cela nous était arrivé. Ce jour-là, à près d’une lieue de l’estuaire, ils trouvèrent deux Indiens de la province d’Acalan qui venaient de Mazatcan où ils avaient échangé du sel contre des étoffes ; ce qui parut vrai puisqu’ils étaient chargés d’étoffes. On me les amena et je leur demandai si les gens de ce village avaient eu vent de ma présence. Ils me répondirent que non, et qu’ils étaient fort tranquilles. Je les engageai à venir avec moi, qu’ils n’y perdraient rien, au contraire ; que je les récompenserais, parce que j’étais ami de tous les habitants de la province d’Acalan, dont je n’avais reçu que de bons offices.

Ces deux Indiens acceptèrent ma proposition et revinrent sur leurs pas nous servant de guides ; ils nous firent prendre une autre route que celle ouverte par mes Espagnols ; celle-ci allait directement aux villages, l’autre conduisait aux cultures du village. Nous passâmes cette nuit-là dans le bois, et le jour suivant, les Espagnols qui allaient en avant comme éclaireurs, tombèrent sur quatre Indiens de Mazatcan armés d’arcs et de flèches qui semblaient postés là comme vedettes ; les Espagnols courant sur eux, ils décochèrent leurs flèches qui blessèrent un de nos Indiens. Comme le bois était très épais on ne fit qu’un prisonnier qui fut remis aux mains de nos Indiens. Les Espagnols poussèrent en avant, espérant trouver d’autres vedettes ; les trois Indiens qui avaient fui, les ayant vus passer, retournèrent sur leurs pas et tombèrent sur les nôtres pour délivrer leur camarade prisonnier ; ils y réussirent après avoir battu ceux qui le gardaient ; mais les nôtres les poursuivirent à leur tour à travers bois, blessèrent l’un d’eux d’un grand coup de couteau dans le bras, et le firent prisonnier, pendant que