Page:Cortés - Lettres à Charles Quint, trad. Charnay, 1896.djvu/335

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et c’est Apaspolon, dont j’ai parlé à Votre Majesté. La source de sa fortune est le grand commerce qu’il poursuit jusqu’à la ville de Nito, dont je parlerai plus tard, où je rencontrai des Espagnols de la compagnie de Gil Gonzales de Avila. Apaspolon avait tout un faubourg uniquement peuplé de ses facteurs et dont le chef était un de ses frères ; les principaux produits dont ils s’occupent sont le cacao, les étoffes de coton, les teintures et certaines couleurs spéciales dont ils se couvrent le corps pour se défendre du froid et de la chaleur. Ils vendent aussi du bois résineux pour s’éclairer, des gommes pour encenser les idoles, des esclaves et des colliers de coquillages en couleurs, qu’ils recherchent beaucoup pour leur parure. Dans leurs fêtes, il se fait aussi des transactions au sujet d’objets d’or, mais il est toujours mêlé de cuivre ou d’autre métal.

Je répétais à Apaspolon et à tous ceux qui venaient me voir, ce que j’avais dit à tous les autres le long de la route à propos de leurs idoles, de ce qu’il leur fallait croire et faire pour être sauvés et ce que chacun devait au service de Votre Majesté. Ils parurent m’écouter volontiers, brûlèrent plusieurs de leurs idoles en ma présence, promirent de ne plus les adorer et jurèrent d’obéir à tout ce que je leur commanderais de la part de Votre Altesse ; après quoi je partis comme je l’ai dit plus haut.

Trois jours avant de quitter cette province d’Acalan, j’avais envoyé quatre Espagnols avec des guides pour étudier la route qui conduisait à la province de Mazatcan qui s’appelle ici Quiatleo, parce qu’on m’avait dit qu’il y avait là de grandes étendues désertes et qu’il me faudrait dormir quatre jours dans les bois avant que d’arriver dans la province. Je voulais donc qu’on examinât cette route, savoir s’il y avait des rivières et des marais, et donnai ordre à tous mes gens, de se charger de six jours de vivres afin de ne pas nous retrouver dans les mêmes difficultés. Cela leur fut facile, vu l’abondance de toutes choses. À cinq lieues plus loin que l’estuaire, je rencontrai les Espagnols que j’avais envoyés à la découverte du chemin : ils me dirent que la route était belle quoique passant à travers des bois épais, mais qu’elle était plane, sans rivière, ni marais pour