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Page:Cortés - Lettres à Charles Quint, trad. Charnay, 1896.djvu/56

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dans la vallée, les messagers ne revinrent pas. Je demandai aux gens de Cempoal qui étaient avec moi pourquoi ces messagers ne revenaient pas. Ils me répondirent que c’était loin, et qu’ils ne pouvaient revenir aussi vite. Voyant que leur retour tardait, les principaux de Cempoal m’assurant de l’amitié des Indiens de cette province, je partis pour m’y rendre.

À la sortie de la vallée je tombai sur une grande muraille de pierres sèches, de neuf à dix pieds de hauteur qui traversait toute la vallée, d’une montagne à l’autre. Cette muraille avait vingt pieds de large, elle était garnie sur toute sa longueur d’un parapet d’un pied et demi d’épaisseur, pour d’en haut combattre à l’abri ; elle n’avait qu’une seule entrée de dix pas de large où les deux murailles se croisaient en forme de ravelin d’une largeur de quarante pas, de manière que l’entrée était circulaire au lieu d’être droite. Je demandai la raison de cette muraille et l’on me dit que les gens de Tlascala l’avaient construite pour défendre leur frontière ; car ils étaient ennemis de Muteczuma et toujours en guerre avec lui. Les habitants de la vallée m’engagèrent, puisque j’allais voir Muteczuma leur seigneur, à ne point passer chez ses ennemis, qui peut-être pourraient m’attaquer et me faire beaucoup de mal ; qu’ils me serviraient de guides auprès de Muteczuma, dont nous ne quitterions pas le territoire et que partout nous y serions bien reçus.

Mais ceux de Cempoal me supplièrent de ne pas les écouter et de prendre par Tlascala ; affirmant que ce qu’on m’en disait n’était que pour me priver de l’appui de cette province ; que tous les gens de Muteczuma étaient traîtres et mauvais, et qu’ils me conduiraient en quelque endroit d’où je ne pourrais sortir. Comme j’avais plus confiance dans les gens de Cempoal que dans les autres, je suivis leur conseil et m’engageai sur le chemin de Tlascala, entraînant mes hommes dans la destinée que je pensais la meilleure. Alors, à la tête de six chevaux, je pris l’avance d’une demi-lieue, ne pensant guère a ce qui allait m’arriver. Je m’avançai pour voir le pays, éclairer la marche et pourvoir à tout événement.

Après avoir fait quatre lieues, deux de mes cavaliers qui allaient en avant virent quelques Indiens avec les coiffures de plumes qu’ils portent en cas de guerre, armés d’épées et de bou-