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Page:Cortés - Lettres à Charles Quint, trad. Charnay, 1896.djvu/70

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quelque mal : je continuai combattant par la ville, non sans avoir laissé une bonne garnison dans notre demeure, et je finis avec l’aide des six mille Tlascaltecs et des quatre cents Cempoaliens par jeter les habitants hors la ville.

De retour à mon palais, je fis venir les notables que j’avais fait incarcérer et leur demandai pourquoi ils avaient voulu me tuer ; ils me répondirent que ce n’étaient pas eux mais les gens de Culua qui les avaient entraînés dans cette affaire ; que comme vassaux de Muteczuma ils avaient dû obéir et que ce prince qui avait organisé le complot, tenait à cet effet cinquante mille hommes en garnison à une lieue et demie de la ville ; mais qu’ils comprenaient maintenant combien ils avaient été trompés ; que je n’avais qu’à délivrer l’un d’eux ; qu’il rappellerait les habitants et ramènerait les enfants et les femmes avec leur bien. Ils me priaient de leur pardonner ; ils me juraient qu’à l’avenir, personne jamais ne les tromperait de nouveau et qu’ils seraient mes amis et les sujets fidèles et loyaux de Votre Altesse. Après leur avoir reproché leur perfidie, je donnai la liberté à deux de ces notables et le jour suivant la ville était repeuplée, pleine de femmes et d’enfants, comme si rien d’extraordinaire n’était arrivé. Je libérai immédiatement tous mes autres prisonniers qui me promirent de servir loyalement Votre Majesté. Pendant les quinze jours que je passai à Cholula, la ville et les environs jouirent d’une paix profonde, il y avait dans les rues un tel mouvement qu’on n’aurait pu se douter que personne y manquât, car les affaires se traitaient et les marchés se tenaient comme de coutume.

Je fis en sorte que les habitants de Cholula et les Tlascaltecs devinssent amis ; ils l’étaient auparavant et il n’y avait pas longtemps que Muteczuma par son astucieuse politique avait attiré les Cholultecs dans son alliance en les éloignant de leurs anciens alliés. Cette ville de Cholula est située dans une plaine ; elle renferme plus de vingt mille maisons dans la cité et tout autant dans ses faubourgs. C’est une seigneurie indépendante avec frontières bien déterminées ; les gens n’obéissent à aucun maître et se gouvernent entre eux comme les habitants de Tlascala. Les Cholultecs sont en quelque sorte mieux vêtus que les