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Page:Cortés - Lettres à Charles Quint, trad. Charnay, 1896.djvu/72

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Ces gens me répondirent qu’il y avait longtemps qu’ils étaient près de moi ; qu’ils ne savaient du complot rien de plus que les choses dont ils avaient été les témoins involontaires ; qu’ils ne pouvaient croire que rien eût été fait par les conseils et l’ordre de Muteczuma ; qu’ils me priaient de bien m’informer de la vérité sur toutes choses avant de lui déclarer la guerre, ou rien faire pour perdre son amitié ; que je permisse à l’un d’eux d’aller le voir et qu’il reviendrait aussitôt. Il y a de cette ville à la résidence de Muteczuma une vingtaine de lieues.

J’acceptai la proposition, et laissai partir le messager qui revint six jours plus tard ; il me rapportait dix plats en or, quinze cents pièces d’étoffe, des milliers de poules et de vases pleins d’une boisson dont ils font usage. Il me dit que Muteczuma avait été fort peiné de la conspiration organisée à Cholula, mais que je ne devais pas croire qu’il y était pour rien ; que cela était absolument faux ; que les troupes qui campaient dans le voisinage étaient bien à lui, mais qu’on les avait envoyées sans ordre de sa part et sur la demande des Cholultecs ; cette troupe, ajoutait-il, venait, il est vrai, de deux provinces qui lui appartenaient, dont l’une s’appelait Acazingo et l’autre Izucar ; elles confinaient à Cholula et comme il y avait entre elles et cette ville des traités d’alliance pour s’entr’aider en cas de besoin, on avait tout naturellement appelé ces troupes sans le consulter ; mais que dorénavant, ses œuvres me prouveraient si oui ou non il m’avait dit la vérité : que maintenant encore il me priait de ne point insister pour aller le voir ; que le pays était stérile, que nous manquerions de bien des choses et qu’en quelque endroit que je me trouvasse, je n’avais qu’à lui demander ce dont j’aurais besoin, pour qu’il me l’envoyât immédiatement.

Je lui répondis que ma visite à Muteczuma ne pouvait se remettre ; que j’avais à rendre compte du royaume et du souverain à Votre Majesté ; mais que je voulais bien croire ce qu’il m’envoyait dire ; que, somme toute, il voulût tenir pour bien cette visite que j’étais obligé de lui faire et qu’il ne se hasardât point à ce sujet dans une nouvelle conspiration qui pourrait lui coûter fort cher, ce qui je regretterais infiniment.

Quand Muteczuma apprit que j’étais bien résolu à l’aller voir,