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Page:Cortés - Lettres à Charles Quint, trad. Charnay, 1896.djvu/82

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de Tlascala vous ont dit beaucoup de mal de moi ; ne croyez rien de plus que ce que vous verrez vous-même et surtout de gens qui sont mes ennemis, dont plusieurs étaient mes vassaux, qui ont profité de votre arrivée pour se révolter et me calomnient pour se faire bien venir de vous. On vous a dit aussi que mes palais avaient des murailles d’or, que les nattes étendues dans mes salons et autres articles de mon service étaient également en or, que je me faisais adorer comme un dieu, et autres absurdités. Les palais, vous les voyez ; ils sont de terre, de pierre et de chaume. » Puis, soulevant ses vêtements, il me montra son corps en disant : « Vous voyez que je suis de chair et d’os comme vous », et de ses mains, se palpant les bras et le corps : « Vous voyez que je suis mortel et palpable, et vous voyez combien ces hommes ont menti. Il est vrai que je possède quelques objets en or qui me viennent de mes ancêtres ; ils sont à vous, si vous les désirez. Je m’en retourne dans d’autres palais où je demeure. Ici vous serez pourvu de toutes les choses nécessaires à vous et à vos hommes. N’ayez aucune inquiétude ; ce pays est le votre comme ce palais est à vous. »

Je m’efforçai, dans ma réponse, de dire à Muteczuma les choses qui convenaient le mieux, surtout en ce qui touchait Votre Majesté, qui était bien le personnage qu’ils attendaient depuis si longtemps. Il prit congé, et peu après, on nous envoya des poules, du pain, des fruits et autres choses nécessaires pour le service de nos appartements. Je passai six jours de cette manière, vivant dans l’abondance et visité par une foule de seigneurs de la ville.

Seigneur Très Catholique, je vous disais, au début de cette lettre, comment lorsque je partis de la ville de la Vera Cruz à la recherche de Muteczuma, j’y avais laissé cent cinquante de mes hommes pour achever la forteresse que j’avais commencée ; je vous disais aussi comment j’avais laissé plusieurs villages et forteresses des environs de la ville soumis à Votre Altesse, les naturels en paix et la plupart vassaux de Votre Majesté. Or, me trouvant en la ville de Cholula, je reçus des lettres du capitaine que j’avais nommé commandant de la ville, lettres par lesquelles il me faisait savoir que Qualpopoca, cacique de la ville