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Page:Cortés - Lettres à Charles Quint, trad. Charnay, 1896.djvu/92

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gneur qui venait de la part de Muteczuma ; j’ai su depuis, qu’il était proche parent du prince et qu’il avait son royaume près du sien. On l’appelle Culhuacan, la capitale est une grande ville qui s’élève sur les bords de la lagune d’eau salée, que l’on franchit en canoas : pour se rendre à Tenochtitlan par eau, la distance est de six lieues ; par terre, elle est de dix.

Cette ville s’appelle Tezcoco et renferme environ trente mille maisons. Il y a, Seigneur, dans cette ville, des palais et des temples magnifiques, des pyramides et des oratoires admirablement travaillés. Il y a de grands marchés, et en dehors de sa capitale, le seigneur a deux autres villes, l’un à trois lieues de Tezcoco, Oculma, l’autre à six lieues appelée Otumba ; chacune de ces villes compte trois ou quatre mille maisons. Cette province de Culhuacan a d’autres villages, fermes et exploitations rurales en grandes quantités. Ce royaume est limitrophe de la république de Tlascala, aujourd’hui vassale de Votre Majesté. Depuis que Muteczuma est entre mes mains, le roi de cette ville qui se nomme Cacamazin, s’est révolté aussi bien contre Votre Altesse à laquelle il avait juré obéissance, que contre Muteczuma. Quoique je l’eusse sommé maintes fois de venir recevoir les ordres de Votre Majesté, il s’y refusa toujours quoi qu’il reçût les mêmes ordres de Muteczuma. Il répondait simplement que si on avait à lui dire quelque chose, on vînt le trouver chez lui ; il verrait ce qu’il avait à faire et quel service on exigeait de lui. En même temps, j’appris qu’il avait une grande quantité de gens de guerre tout près à se mettre en marche. Comme il ne tenait compte, ni de mes avertissements ni de mes remontrances, j’en parlai à Muteczuma et je lui demandai ce que nous devions faire pour que sa rébellion ne restât pas impunie. Il me répondit que vouloir s’en emparer par violence offrait un grand péril ; c’était un grand seigneur, à la tête d’une nombreuse armée, qu’on ne pourrait prendre sans sacrifier beaucoup de monde ; mais qu’ayant nombre de ses principaux serviteurs à la cour de Cacamazin, il les engagerait à ménager des complices qui, une fois gagnés à notre projet, nous rendraient facile la prise de ce seigneur. Ce fut ce qui arriva. Muteczuma prit ses mesures de telle façon, que ses affiliés per-