Aller au contenu

Page:Coubertin - Histoire universelle, Tome IV, 1926.djvu/105

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
101
la révolution française et l’empire

LA RÉVOLUTION FRANÇAISE
ET L’EMPIRE

La révolution française — tragédie brève — n’est pas séparable de son long prologue, le règne du roi qui la prépara — ni de son fulgurant épilogue, le règne de l’empereur qui la confisqua. Louis XV (1715-1774), la Convention (1792-1795), Bonaparte (1800-1814) évoquent des régimes fort opposés quant à leurs caractères extérieurs, enchaînés pourtant l’un à l’autre de façon très étroite.

i

À la mort de Louis XIV, la monarchie française eût pu établir en trois mots le bilan de sa situation : paix, économie, moralité. C’étaient là ses besoins immédiats, les conditions de son existence. Il lui fallait cela pour tenir debout mais ce n’était pas suffisant pour lui permettre de tenir solidement. La solidité ne pouvait lui venir que d’institutions propres à remplacer celles qu’on avait jeté bas. Or des institutions nationales ne s’improvisent pas. Pour en construire de nouvelles, il faut l’effort d’une génération pétrie par une pédagogie saine et résolue. Ce qui advint fut tout autre. Guerre sans trêve, gaspillage croissant, amoralisme effréné, ainsi se résume le règne de Louis XV. Quant à l’éducation, les dirigeants la donnèrent eux-mêmes au pays sous forme de leçons de choses d’un cynisme complet.

Nulle guerre ne s’imposait. Henri IV et Richelieu qui ne bataillaient qu’à bon escient eussent remercié la providence de leur avoir ménagé une situation à ce point favorable. Séparée désormais de l’Espagne et bien que se maintenant redoutable par la possession de la Belgique et du Milanais, l’Autriche voyait se dresser à ses côtés une Prusse et une Russie soudainement fortifiées. Les querelles continentales auxquelles la Suède avait participé étaient mal apaisées ; d’autres menaçaient de naître dont l’Angleterre, de par sa nouvelle dynastie hanovrienne, aurait à subir le contre-coup. La Pologne pour affaiblie qu’elle fut détenait encore une force appréciable. De même la Turquie. En Italie enfin, ni le jeune royaume de Sardaigne ni le vieux