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Page:Coubertin - Histoire universelle, Tome IV, 1926.djvu/108

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histoire universelle

la guerre continentale, alliée cette fois de l’Autriche contre la Prusse : politique qui la conduisit au traité de Paris (1763) par lequel elle perdit le Canada, les vallées de l’Ohio et du Mississippi, la Louisiane, la plupart des Antilles et ne conserva au Sénégal qu’un îlot et, dans l’Inde, cinq villes démantelées.

Les finances, comme bien l’on pense, se trouvaient fort mal de ces luttes coûteuses. Au commencement du règne, pendant la régence du duc d’Orléans, une crise d’agiotage avait sévi. Pour remédier à l’énorme déficit laissé par Louis XIV, le régent avait eu recours à un banquier écossais du nom de Law. Celui-ci ayant observé le fonctionnement des banques fondées au siècle précédent à Londres et à Amsterdam en avait conclu à l’efficacité absolue du papier-monnaie sans apercevoir les dangers d’une inflation artificielle dans un pays où déjà les spéculateurs abondaient. Car tout gouvernement à la fois belliqueux et appauvri est entouré de prêteurs et de fournisseurs à forfait qui édifient de rapides et scandaleuses fortunes aux dépens de l’État. La France en avait pâti. En 1716 on avait cherché à faire rendre gorge à ces nouveaux riches. Un tribunal exceptionnel avait été institué… mais malgré les encouragements donnés à la délation, c’est à peine si une centaine de millions étaient rentrés dans les caisses publiques. Law promettait merveilles. Il obtint un privilège d’émission. Sa banque d’abord privée puis officielle distribua de superbes dividendes et l’on vit des particuliers gagner jusqu’à un million en une journée. Personne à Paris n’avait jamais conçu chose pareille. Quand on eut fabriqué pour plus de trois milliards de papier-monnaie, l’immanquable débâcle se produisit. L’État gagna à cette faillite en ce que ses charges et ses dettes en furent quelque peu réduites mais aucune amélioration sérieuse n’en pouvait résulter. On recommença à vivre d’expédients financiers au jour le jour et la situation ne fit que s’aggraver.

ii

Il en était de même dans presque toute l’Europe car tous les États étaient plus ou moins lourdement endettés et ne jouis-

    peu coordonnée (la bataille de Fontenoy symbolise bien son élégante bravoure). D’autre part, le faste des officiers contrastait douloureusement avec la misère des soldats mal recrutés, mal nourris et sans cesse brutalisés. Pendant la guerre dite de sept ans, le comte de St-Germain écrivait que « la misère du soldat fait saigner le cœur ». On le fait « vivre comme un chien enchaîné ». Résultat : soixante mille désertions.