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Page:Courouble - L'étoile de Prosper Claes, 1930.djvu/124

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encore réussi à toucher son cœur. Du reste, elle ne le prenait pas au sérieux, le considérant comme bien plus jeune qu’elle, encore qu’il fût son aîné de près de trois ans.

Certes, il était impossible qu’elle n’eût pas remarqué la flamme de ses yeux quand il la regardait, et son furtif manège derrière les rideaux de sa fenêtre ; mais elle n’en était nullement émue, bien qu’elle n’en fût pas agacée non plus.

Elle plaisantait volontiers avec lui sans l’autoriser, toutefois, à aucun propos trop hardi.

Telles étaient du moins ses façons envers le jeune Lavaert avant la guerre. Depuis, elles s’étaient modifiées sensiblement et jusqu’à devenir très réservées, voire très sèches. La jolie tripière, fille énergique et dont le patriotisme s’était éveillé en apprenant la mort du fils Spreutels et de tant d’autres vaillants Bruxellois du quartier, rendait des services à certains émissaires du Gouvernement belge. Elle les documentait dans la mesure de ses moyens et leur fournissait des vivres gratuitement. Aussi, comprend-on le profond mépris qu’elle nourrissait contre ces jeunes gens en âge de servir mais trop lâches pour passer la frontière.

En dépit de ses vingt-deux ans et d’une constitution très robuste, le petit Louis n’avait pas encore été appelé sous les armes. Grâce aux démarches de son père, il avait obtenu plusieurs sursis, sous prétexte de hernie. Mais son cas ne trompait personne d’autant plus que pour se rendre au Conservatoire, l’étudiant gravissait les