Aller au contenu

Page:Courouble - La Famille Kaekebrouck,1902.djvu/176

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
162
FERDINAND MOSSELMAN

raies blanchâtres sur le pavé, ou bien établissaient des lignes de délimitation avec des paniers jetés sur le sol.

Dans l’encadrement de la grande porte du commissariat, sous l’œil vert du fanal, trois agents de police surveillaient ce fourmillement indistinct d’où montait une sourde rumeur. Cependant, de longues charrettes aux paniers étagés par-dessus les ridelles, arrivaient lentement, roulant bas et comme avec précaution, conduites par le maraîcher marchant à reculons, les mains à la bouche de son gros cheval.

Et d’autres ombres prestes, la tête chargée de pyramides, sortaient de toutes les rues avoisinantes, comme une volée d’oiseaux de nuit, et couraient à pas feutrés, laissant derrière elles le sillage d’un exquis parfum de fraises.

C’était un spectacle magnifique, un merveilleux grouillement d’êtres fantasmatiques sur qui la lumière clignotante de quelques réverbères jetait par-ci par-là, à travers les feuilles tendres, livides des arbres un rayon terne, inquiétant.

Mosselman regardait de tous ses yeux ; peu à peu, il vit l’ordre s’établir sur la place : les ombres se démêlaient, se groupaient, devenaient moins fébriles, et quelques-unes déjà demeuraient