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Page:Courouble - La Famille Kaekebrouck,1902.djvu/61

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LES FIANÇAILLES DE JOSEPH KAEKEBROECK

tout mon distantisme et mes dilettantismes natifs se sont encore aiguisés.

» Je portais toujours des vêtements sombres, soigneusement râpés avec du papier de verre pour en casser l’odieux apprêt, et des cravates d’un ton amorti, si bien que je fus en peu de temps, je l’avoue sans nulle fatuité, l’un des plus élégants, encore que l’un des moins bêtes jeunes hommes de la ville.

» Insensé, qui ne voyait point que plus il devenait un être rare et de fine culture intellectuelle, tant plus son nom prenait une sonorité grotesque ! Je suis tout simplement parvenu à provoquer la condoléance, l’immense pitié qui s’épanche en cette phrase cruelle : « Pauvre garçon, hélas, si distingué, et se nommer Kaekebroeck ! »

» Oui, c’est mon aventure. Mais halte là ! comme il Trovatore, je pense que c’est trop longtemps souffrir. Donc je barre, j’efface ma vie ! J’en recommence une autre. Car je forme en ce jour un projet hardi : je vais retourner à ma race. Il faut que, doucement, j’en retrouve les allures spontanées, les mœurs libres et sincères, la grosse joie sociale et le verbe célèbre !

» Ainsi dépouillé du vieux jeune homme,