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Page:Créquy - Souvenirs, tome 5.djvu/110

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SOUVENIRS

dans le jardin de l’hôtel de Soubise, et l’on y trouva ce qui suit :

Faire dire à M. Mercier que c’est moi qui ai décidé l’obtention du mandat des 500 livres.

Revenir sur le système des idées innées en conversant avec M. de Laharpe.

Retourner voir M. Thomas avant sa guérison ; lui reparler de son dernier poème afin de le louer davantage.

C’était une grande femme apprêtée, corsée, busquée, toujours endimanchée, tirée, comme dit le peuple, à quatre épingles, et ficelée comme une carotte de tabac. Laharpe assurait l’autre jour que j’avais dit autrefois que Mme Necker était taillée comme une caisse d’épargnes, qu’elle avait la physionomie d’un registre en partie double et que c’était la ville de Genève en fourreau de soie coquelicot : je ne m’en souvenais pas, et je ne m’en dédirai point ; mais ce qu’elle avait de plus excentrique et de plus exotique, c’était de se mouvoir ainsi que par une manivelle à ressorts, et de parler comme une machine à galimatias double, avec des ronflemens évangéliques en style réfugié, des modulations flûtées par le philanthropisme, et puis des tons de sévérité pédagogique à n’y pas tenir. On ne disait pas que ce fût (tout-à-fait) une honnête personne ; mais c’était, dans tous les cas, une insoutenable pédante ! Quand le Duc de Lauzun se mettait sur son beau dire (après le dessert), il se répandait contre elle en torrens d’exécration, et disait toujours qu’il ne mourrait jamais satisfait s’il n’avait pas eu le plaisir de la souffleter. Je n’ai jamais vu sentiment d’animadversion comparable à celui