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Page:Créquy - Souvenirs, tome 5.djvu/120

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SOUVENIRS

C’est vous que je figurerai,
Lorsqu’à Paphos je reviendrai
Et que j’aurai la main plus sûre.
Ah ! si jamais de ma façon,
De vos attraits on voit l’image ?…
On sait comment Pygmalion
Traitait autrefois son ouvrage ?…

Il me reste à vous parler de Mademoiselle Necker, dont l’heureuse enfance et l’adolescence avaient été si parfaitement bien dirigées du côté de la pudeur, qu’elle ne voulait pas faire sa toilette devant le petit chien de sa mère ; mais pour la chienne de son papa, c’était différent : elle s’habillait en sa présence, à raison du genre et sans la moindre difficulté (c’était Madame Necker qui contait cela).

Le premier jour où le Baron de Staël ait paru dans leur salon, l’innocente fille était à regarder des images de la Bible. — Eh ! comment voulez-vous, disait-elle aux petites demoiselles Pictet, que je puisse vous faire distinguer la figure d’Ève de celle d’Adam ? Il est impossible de les reconnaître puisqu’ils ne sont pas habillés… Représentez-vous donc cette grosse pouponne de dix-neuf ans qui avait des appas comme une fermière, et voyez un peu le joli disparate entre l’ignorance qu’elle affectait sur les choses humaines et son bel esprit d’observation sur les chiens.

La fille de Mme Necker avait donc commencé par imiter sa mère en affectant la pruderie la plus renchérie, et c’est au printemps de sa vie qu’il faut rapporter ces vers du Comte de Sesmaisons :