Aller au contenu

Page:Créquy - Souvenirs, tome 5.djvu/190

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
186
SOUVENIRS

M. de Beauvau racontait qu’à l’Académie française, il avait entendu M. de Talleyrand s’extasier sur la beauté de je ne sais quelle phrase qui venait d’être citée par le discoureur académique. C’est un mot charment ! se prit-il à dire ; et d’où cela vient-il ? Le Maréchal de Beauvau lui répondait que c’était de M. l’Évêque d’Autun, et le Comte de Sennectere (qui était aveugle, et qui ne connaissait pas la voix de M. de Talleyrand) répondait au Maréchal : — Holà, Prince, holà, vous manquez de justice ; vous deviez dire que la phrase est de M. Chamfort.

Étant plus jeune, il avait eu l’envie, M. de Talleyrand, de s’attribuer la composition d’un conte nouvellement publié sans nom d’auteur, et qui s’appelait Aline, Reine de Golconde. Il avait été s’en vanter à la Mise de Coigny qui savait très bien à quoi s’en tenir, et qui lui fit la malice d’aller dénoncer la chose au Prince de Craon. Celui-ci fut dire à M. de Talleyrand : — Mon Dieu, Monsieur, je viens d’apprendre que vous êtes l’auteur d’Aline, et je vous promets que je vais joliment tancer mon neveu de Boufflers, qui nous avait dit tout autre chose[1] !

    d’âpreté virulente. Voyez mes pièces justificatives au treizième numéro de ces cahiers.

    (Note de l’Auteur.)

  1. Stanislas de Boufflers, né en 1757, d’abord abbé commandataire de N.-D.-en-Barreil, ensuite Chevalier de Malte et Capitaine des gardes du Roi de Pologne, Duc de Lorraine et de Bar. Il est devenu Marquis de Rumiencourt par succession du chef de sa branche, et c’est en émigration qu’il a épousé la veuve du Marquis de Sabran. Le Marquis de Boufflers est mort à Paris en 1815.
    (Note de l’Éditeur.)