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Page:Créquy - Souvenirs, tome 5.djvu/65

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DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

fils contre les princes lorrains, ce ne serait pas à l’occasion d’un bal, mais à propos des promotions et des processions de l’ordre du Saint-Esprit, où nous les voyons précéder nos maris, nos frères et nos enfans, sans en rien dire. On leur donne à 25 ans le cordon bleu que les seigneurs français ne peuvent obtenir avant 35 ans, aux termes des statuts ; nous les voyons mettre leur chapeau lorsque le Roi se couvre ; et nous ne pensons pas à réclamer contre ces prérogatives. Vous nous dites curieusement que MM. de Lorraine les ont obtenues dans un temps où leurs prétentions ont été favorisées par les circonstances, mais on pourrait faire ainsi l’histoire de toutes les prérogatives ; et, du reste, j’aimerais mieux faire cause commune avec cette maison-là qu’avec des bourgeois parvenus, comme il y en a dans vos signataires. Laissez-moi donc tranquille avec la Princesse Charlotte et son menuet.

Il faut vous dire que, dans cette année 1770, les Champs-Élysées n’étaient ni plantés ni percés, que le pont Louis XVI n’existait pas, que le quai des Tuileries n’était qu’un sentier de hallage, et que cette rue Royale qui conduit de la porte Saint-Honoré sur la place de Louis XV n’était ni tout-à-fait bâtie, ni alignée, ni pavée. Toute la partie septentrionale de la même rue, qui vient aboutir sur le boulevard, était encore obstruée par de vieilles maisons à moitié démolies ; et, de plus, on avait pratiqué, pour la construction d’un égout, un fossé très-large et très-profond, qui se prolongeait dans toute la longueur de cette rue projetée.

Vous voyez donc qu’il n’existait alors que deux