Aller au contenu

Page:Créquy - Souvenirs, tome 8.djvu/73

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
69
DE LA MARQUISE DE CRÉQUY.

minuit, lorsque nous entendîmes frapper à travers la porte de notre chambre : on nous intima, de la part de la commune de Paris, l’ordre d’enlever du Temple la Psse de Lamballe, ma Mère et moi.

« Madame Élisabeth se leva sur-le-champ ; elle-même m’aida à l’habiller, m’embrassa et me conduisit chez la Reine. Nous trouvâmes tout le monde sur pied ; la séparation d’avec la famille royale fut une peine cruelle ; et quoique on nous assurât que nous reviendrions après avoir subi un interrogatoire, un sentiment secret nous disait que nous la quittions pour longtemps.

« Nous traversâmes les souterrains aux flambeaux ; à la porte du Temple nous montâmes en fiacre et on nous conduisit à l’Hôtel-de-Ville. On nous établit dans une grande salle ; et de peur que nous pussions causer ensemble, un municipal était assis entre chacune de nous et nous séparait. Nous restâmes ainsi sur des banquettes pendant plus de deux heures ; enfin, vers les trois heures du matin, on vint appeler la Princesse de Lamballe pour l’interroger ; ce fut l’affaire d’un quart d’heure après lequel on appela ma Mère ; je voulus la suivre, on s’y opposa, disant que j’aurais mon tour ; ma Mère, en arrivant dans la salle d’interrogation qui était publique, demanda que je fusse ramenée auprès d’elle, mais on la refusa très rudement, lui disant que je ne courais aucun danger étant sous la sauvegarde du Peuple. On vint enfin me chercher et on me conduisit à la salle d’interrogation. Là, monté sur