Page:Crevel - Détours, 1924.djvu/24

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derrière les coulisses ? Or certain orgueil accuse de futilité ces détours ; et je ne rencontrais pas le seul qu’il m’importait de connaître. J’essayai de feindre la joie ; elle n’était qu’un costume de la même inutilité que le maillot de coton rose aux jambes des danseuses sur le tréteau des foires.

Narcisse au piètre ruisseau, je n’apercevais personne sur l’autre bord à qui dédier mon amitié ; cette amitié, pourtant, m’étais-je mis à croire, pouvait seule me permettre le bonheur. Je l’imaginais glace ; en elle un visage dont on se serait soucié de savoir s’il valait la réalité d’un être extérieur ou réfléchissait sans plus un moi complaisamment projeté.

Hélas ! nul ne m’offrit le monde nouveau ; il n’y eut pas le démolisseur de la cité des hommes. Je n’entrai pas dans cette ville que j’espérais au soir entre ciel et terre plutôt gravée que bâtie. Je me cognais aux monuments de tous les jours et, pour m’y résigner, j’avais trop voulu de mes propres mains une forêt en pierres amoureuses du rire des scies.