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Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 3, Amyot, 1846.djvu/152

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dictait ou refusait la paix qu’on n’a même pas daigné lui offrir à Moscou. Il l’espérait pourtant, il l’espérait en vain. Ainsi, la manie des collections a borné l’intelligence du grand politique, il a sacrifié son armée à la puérile satisfaction d’occuper une capitale de plus !  !… Repoussant les avis les plus sages, il fit violence à sa propre raison, afin de venir s’installer dans la forteresse des Czars, comme il avait dormi dans le palais de presque tous les potentats de l’Europe : et pour ce vain triomphe du chef aventureux, l’Empereur a perdu le sceptre du monde.

La manie des capitales a causé l’anéantissement de la plus belle armée de la France et du monde, et deux ans plus tard la chute de l’Empire.

Voici un fait ignoré chez nous, mais dont je vous garantis l’authenticité : il vient à l’appui de mon opinion sur la faute impardonnable commise par Napoléon lorsqu’il a marché sur Moscou. Cette opinion d’ailleurs n’a rien de particulier, puisqu’elle est aujourd’hui celle des hommes les plus éclairés et les plus impartiaux de tous les pays.

Smolensk était considéré par les Russes comme le boulevard de leur pays ; ils espéraient que notre armée se contenterait d’occuper la Pologne et la Lithuanie sans s’aventurer au delà : mais lorsqu’on apprit la conquête de cette ville, la clef de l’Empire, un cri d’épouvante s’éleva de toutes parts ; la cour et le pays