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Page:Custine - La Russie en 1839 troisieme edition vol 3, Amyot, 1846.djvu/200

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Quoi qu’il en soit, les Russes, étouffant le cri de leur conscience, croient au prince plus qu’à Dieu, aussi se font-ils une vertu de sacrifier tout au salut de l’Empire ;….. détestable Empire que celui dont l’existence ne pourrait se perpétuer qu’au mépris de la dignité humaine !!!… Aveuglés par leur idolâtrie monarchique, à genoux devant l’idole politique qu’ils se sont faite eux-mêmes, les Russes, ceux de notre siècle aussi bien que ceux du siècle d’Ivan, oublient que le respect pour la justice, que le culte de la vérité importe plus à tous les hommes, y compris les Slaves, que le sort de la Russie.

Ici m’apparaît encore une fois, dans ce drame aux formes antiques, l’intervention d’un pouvoir surnaturel. On se demande en frémissant quel est l’avenir réservé par la Providence à une société qui paie à ce prix la prolongation de sa vie.

J’ai trop souvent lieu de vous le faire remarquer, un nouvel Empire romain couve en Russie sous les cendres de l’Empire grec. La peur seule n’inspire pas tant de patience. Non, croyez-en mon instinct, il est une passion que les Russes comprennent comme aucun peuple ne l’a comprise depuis les Romains : c’est l’ambition. L’ambition leur fait sacrifier tout, absolument tout, comme Bonaparte, à la nécessité d’être.

C’est cette loi souveraine qui soumet une nation à