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Page:D’Esparbès - Le Roi (1910).djvu/174

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LE ROI

on ne peut vous dire. Mais allez par ce bout ; la rue passée s’aperçoit la cloche, et demandez alors aux matineux qui doivent y attendre le départ du roi pour la guerre.

— Le roi ? la guerre ?

— Vous ne savez pas ! Vous êtes done ici d’aiguillée ?

— Oui… seulement de passage. (Une pause : il attendit que son cœur se tût) Je ne connais pas la ville, je suis de loin. Et vous dites, demoiselle, que le roi de Navarre…

— S’en va faire des forcements du côté Gascogne. Qui terre a guerre a, dit-elle avec un soupir ; un prince comme lui doit ouvrager son royaume.

— Vous le connaissez ?

Elle regarda l’homme qui venait de toucher son cœur :

— S’aucun vous interroge, y direz nani !

— Défâchez-vous, balbutia-t-il. (Ses mains se croisèrent sur le treillage) Ne partez pas, venez ci.

— Laissez-moi en paix.

— Vous resteriez bien, avoua-t-il, si cette mouche que nous importune de ses fols zonzons (il fit mine de la saisir) bourdonnait dans la coque de votre oreille que le roi et moi nous connaissons bien (d’un air distrait), et que je fis campagne sous sa cornette, à l’échauffourée de Moncontour.

Curieuse, elle regarda l’étranger, ses yeux. simples, son corset de soldat, ses bottes tachées de boue, et revint vers lui à pas timides.