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Page:D’Esparbès - Le Roi (1910).djvu/285

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LE ROI

hurlant autour du cercueil dont le vent fouettait l’écharpe royale, il marcha dès lors vers Mayenne, escorté d’une bande immense. Les canonniers de Rosny, placés au pont, et les pièces du château d’Arques ouvrirent en voyant s’avancer le roi quatre belles et longues rues dans les rangs ligueurs qui semblèrent tomber à genoux sur les jambes tranchées des chevaux. Pendant qu’ils s’arrêtaient, le tumulte arriva devant la Chapelle où le roi soudain montra les Allemands : « Pastoureaux, voilà de la laine ! » Il saisit le bridon du cheval qui portait le cercueil : Sera-t-il dit aujourd’hui que je n’aurai point osé ma personne ! Je vais faire enfin le bon compagnon ! Charge et recharge ! rugit-il vigoureusement, tue ! aux mains ! en avant de l’espadonnade ! aidez-vous ! » Un orage de sonneries furieuses, à son geste, s’en alla gémir dans la forêt d’Arques ; on vit le cercueil maîtrisé par le poing du roi s’enlever d’un bond dans le rouge éclair des arquebuses ; des voix crièrent : « Sire, vous êtes blessé ! » — « Non, c’est mon linge qui saigne ! » et les cinq cents hommes dans le braillement des tambours qui couraient comme chiens bergers s’élancèrent vers la Chapelle ! Le cercueil cahoté se montrait toujours en avant, criblé déjà par les balles, et guidant son porteur hagard le Gascon sans pouvoir se taire bataillait de sa formidable main droite : « Ici, ma noblesse ! Casques aux plumails blancs, pressez-vous autour de ce mort qui vous enseigne aujourd’hui ! » Quelques-uns des nobles,