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Page:D’Esparbès - Le Roi (1910).djvu/321

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LE ROI

percé par une lance qui fila dans le ventre d’un canon et accrocha l’homme contre sa pièce ; puis les grands gendarmes s’en retournèrent : l’artillerie royale était prise.

Au lieu de s’en désoler, le Gascon se sentit la tête froide ; il y a toujours assez d’air, dans le feu des plus grands désastres, pour les poumons d’un stoïque. Voyant les chevau-légers de MM. d’Auvergne et de Givry et les régiments du vieux maréchal, du duc de Montpensier et de Biron remis en équilibre, il jugea le moment venu de mettre la main aux cartes « si chaudes qu’elles fussent », et murmurant à part lui ladéritampon tararère, s’en vint à ses gentilshommes qui s’impatientaient sur leurs chevaux :

— Glorieuse Cornette blanche, comtes et barons leur cria-t-il, vous êtes Français, je suis votre roi (dardant son glaive), et voici l’ennemi. À eux ! Si les cornettes vous manquent, ralliez-vous à mon grand panache, vous le trouverez toujours en bon chemin ! En avant intrépidement, mort aux mauvais hommes et vive la terre !


Il y eut fâcheries comme à Arques, chacun voulait être premier ; mais monté sur un cheval mordeur qui flairait l’ennemi, le roi tint la tête de son escadron, énorme sous ses plumes blanches, emporté comme un cormoran dans l’orage. Le tumulte arrivait derrière, cliquetant, chargé de bruits tragiques et d’appels féroces où crevaient