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Page:D’Esparbès - Le Roi (1910).djvu/322

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LE ROI

les rouges voix des chevaux, les unes montantes, joyeuses, pleines, terminées par de longs sifflets vers le ciel, les autres cassées de rage, broyées en morceaux, par cris courts, tandis que mille bribes d’écume, tourbillonnants papillons, s’enfuyaient élastiquement des mors mâchurés. La cornette-cyclone aborda l’ennemi-tempête ces deux vagues jointes jaillirent sous le choc, creuses et fumeuses, rejetant à droite et à gauche, dans un inextricable tohu-bohu d’écroulement, tronçons de pendants d’épées, hausse-cols, casques, bandoulières, bois de piques, du sang, du fer, de la confusion et de la mort et jusqu’à des miettes d’écharpes que ce heurt avait déchirées. Le roi meurtri cognait en avant, escorté à dix pas d’un jeune et inince officier que trente grosses poitrines protégeaient galamment des lances ; madame de Gramont, l’épée en gaine, une flamme à son bel œil bleu, traversa l’escadre wallonne sans qu’une seule pique l’atteignit. Les deux troupes furent face à face un quart d’heure, aucune ne céda. La cornette blanche aux fleurs de lis d’or brandie par le comte de Rhodes planait sur l’aile droite au-dessus du casque royal, en haillons de combat, sinistre, tout applaudissante de claquements et violée déjà par les balles. Le nombre enfin prévalut : Malgré la valeur du roi et la rage de ses gentilshommes qui frappaient en Vulcains farouches, l’énorme régiment d’Egmont, renforcé de douze cents reitres, démolit l’aile gauche de l’escadron noble. S’ajoutant au comte