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Page:Dabit - L'hotel du nord, 1929.djvu/212

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— Ça se compare pas, tranchait Couleau. Si vous aimez la musique, il vous faut un appareil de T. S. F.

Jeanne buvait les paroles de Couleau. Elle lui donna 150 francs, toutes ses économies, et il promit de lui fabriquer, rien que pour elle, un « poste-bijou ». Un soir, ils tombèrent dans les bras l’un de l’autre.

Bientôt la T. S. F. ne fut plus qu’un prétexte qui favorisait leurs tête-à-tête. Lorsque Couleau rencontrait Jeanne dans le couloir, leur journée de travail terminée, il lui murmurait : « Viens chez moi, on travaillera à ton appareil. » Elle le suivait. Couleau avait ses outils sur la table, de l’ébonite, des bobines, « des résistances » comme il disait, tout ça étalé pour la frime. Au bout de cinq minutes, il lâchait ses fils, faisait fonctionner le « poste » afin que les locataires eussent leur concert, et poussait Jeanne sur le lit.

De cette façon-là, l’ouvrage n’avançait pas. « Et mon poste ? » demandait Jeanne de temps à autre. Elle songeait, un peu dépitée, à tout ce qu’elle aurait pu s’acheter avec 150 francs. Mais le soir venu, Couleau en avait « marre » de l’électricité ! Il lui payait une garniture de peignes, un flacon d’eau de