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Page:Darien - L’Épaulette, Fasquelle, 1905.djvu/370

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farouche. Le juif moderne avait disparu ; et l’Hébreu, frémissant du sombre enthousiasme des vieux âges, se dressait devant moi. J’ai quitté M. Issacar sans lui répondre.

Mais je pense à ce qu’il m’a dit, aujourd’hui, tandis qu’ont lieu les obsèques des victimes. Ces autorités civiles qui n’osent point se montrer, ces troupes alignées le long des rues, massées sur toutes les places ; ces ouvriers cravatés de rouge et ces ouvrières au chignon fleuri d’écarlate ; ces musiciens avec leurs trombones funèbres, ces sociétés avec leurs bannières encrêpées et leurs drapeaux tricolores, ces prêtres qui insultent les cadavres de leurs dérisoires prières et de leur eau bénite putréfiée, ces charlatans du socialisme qui vont égrener au bord des fosses leurs théories misérables — des vaincus tout ça… des vaincus…



En rentrant à Navesnes, nous avons rencontré un troupeau de moutons qu’un berger et un chien poussaient vers l’abattoir. Les moutons étaient des moutons ; le berger était infirme ; le chien avait la gale.