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Page:Daudet – Les Rois en exil – Éditons Lemerre.djvu/185

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LES ROIS EN EXIL

congédiée, les voitures inutiles envoyées au Tattershall, où elles se vendirent dans d’assez bonnes conditions, excepté les carrosses de gala, d’un tire-l’œil trop gênant pour des particuliers. On s’en défit cependant, grâce à un cirque américain qui venait de s’installer à Paris, avec un grand déploiement de réclames ; et ces voitures splendides que Rosen avait fait faire, pour conserver à ses princes un peu de la pompe disparue et dans le lointain espoir d’un retour à Leybach, servirent à des exhibitions de naines chinoises et de singes savants, à des cavalcades historiques et des apothéoses à la Franconi. Vers la fin des représentations, sur le sable foulé de l’arène, aux mesures entraînantes de l’orchestre, on vit ces voitures princières, aux écussons à peine effacés, faire trois fois le tour des gradins, pendant que s’inclinait au bord de leur glaces relevées quelque figure grimaçante et grotesque, ou la tête abrutie dans sa courte frisure, le buste tendu dans les mailles de soie rose, de quelque fameux gymnaste saluant la foule, le front luisant de pommade et de sueur. Toute cette défroque de sacre, tombée dans le paillon et la haute école, remisée parmi les chevaux et les éléphants prodiges, quel présage pour la royauté !

Cette vente au Tattershall, pendant qu’on annonçait celle des diamants de la reine de