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Page:Daudet - Jack, II.djvu/141

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rons un peu d’argent, tout ce qu’il faut… Cela lui fera du bien.

Elle lui sauta au cou avec un élan de reconnaissance :

— Oh ! tiens… C’est encore toi le meilleur de tous.

Et sur-le-champ il fut convenu qu’elle irait le lendemain installer son fils aux Aulnettes.

Ils arrivèrent par un de ces beaux matins d’automne doux et dorés qui semblent un été apaisé, allégé de sa chaleur brûlante et lourde. Pas un souffle dans l’air, mais des chants d’oiseaux en quantité, des crépitements dans les feuilles tombées, et un parfum de maturité, de foins secs, de bruyères brûlées, de fruits bons à cueillir. Les sentiers du bois, à peine éclaircis, semés de fleurs jaunes, sentant le soleil moins puissant, donnaient aussi moins d’ombre, et silencieux, veloutés, s’en allaient vers les clairières. Jack les reconnaissait tous, ces chemins. En y posant le pied, il reprenait possession de quelques années de son enfance, heureuses, inoubliables, où malgré les tristesses de sa fausse position il avait senti son être s’épanouir dans la bonne, dans la libre Nature. Elle aussi semblait le reconnaître, l’appeler, l’accueillir. Dans son âme attendrie de tous ses souvenirs et de toute sa faiblesse, Jack entendait une voix réconfortante et douce : « Viens à moi, pauvre enfant, viens sur mon cœur aux battements lents et calmes. Je t’enlacerai, je te soigne-