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Page:Daudet - Jack, II.djvu/212

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à sa boulangerie. L’enfant reste à la maison tout ce temps-là. Une voisine le surveille, et quand personne ne peut s’occuper de lui, on le met devant la table attaché sur sa chaise, à cause des allumettes… Là, nous sommes arrivés.

Ils entrèrent dans une de ces grandes maisons ouvrières percées de mille fenêtres étroites, traversées de longs couloirs où les pauvres gens établissent leur fourneau, leur porte-manteau, déversent le trop plein de leurs logements restreints. Les portes s’ouvrent sur cette annexe, laissant voir des chambres pleines de fumée, de cris d’enfants. À cette heure, on dînait. Jack en passant regardait des gens attablés, éclairés d’une chandelle, ou bien il entendait le bruit de la vaisselle grossière sur le bois de la table.

— Bon appétit, les amis…, disait le camelot.

— Bonsoir, Bélisaire, répondaient des bouches pleines, des voix joyeuses, amicales. Dans certains endroits, c’était plus triste. Pas de feu, pas de lumière ; une femme, des enfants guettant le père, attendant qu’il rapportât ce soir lundi ce qui lui restait de sa paye du samedi.

La chambre du camelot étant au sixième, au fond du corridor, Jack vit tous ces misérables intérieurs ouvriers, serrés comme les alvéoles d’une ruche dont son ami eût occupé le faîte. Il paraissait pourtant très fier de son logement, le pauvre Bélisaire.

— Vous allez voir comme je suis bien installé, Jack,