Page:De Bachaumont - Mémoires secrets Tome 1 - 1762-1765 - Ravenel - Ed. Brissot-Thivars - 1830.djvu/103

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31. — M. Bouchardon, un des plus fameux sculpteurs de l’Europe, vient de mourir le 27 de ce mois[1]. Il était chargé de la statue équestre du roi que la Ville fait faire. Heureusement son ouvrage est fort avancé : il ne manque plus qu’une des quatre figures qui doivent orner le piédestal.

1er Août. — C’est M. Pigalle qui est chargé de continuer la suite des travaux du Roule. Bouchardon a écrit une lettre[2] à la Ville, dans laquelle il désigne cet artiste pour lui succéder. Cette générosité est d’autant plus louable, que ces deux grands hommes n’étaient point amis, et que la jalousie, trop souvent le partage des petits talens, avait élevé quelques nuages entre eux.

3. — Le bruit court depuis quelque temps que les Jésuites comparaîtront au jour indiqué, et feront plaider leur cause. Un avocat, nommé Domyné de Verzet, doit leur être défenseur. Si cela est, on assure que la réplique, très-courte, est toute prête, « Domine, salvum fac Regem ! » lui dira-t-on.

6. — Il court dans le monde une lettre au sujet d’un nommé Calas, roué à Toulouse, pour avoir assassiné, dit-on, son fils par fanatisme de religion, etc. On prétend que ce père infortuné est innocent. Il est question de travailler à réhabiliter sa mémoire. On attribue à M. de Voltaire cette lettre, qui n’a pas la touche forte et pathétique dont ce sujet était susceptible en de pareilles mains[3].

  1. Bouchardon était né en 1698. La statue commencée en 1748 ne fut inaugurée que le 20 juin 1763. Elle fut renversée le 11 août 1792 en vertu d’un décret rendu la veille par l’Assemblée Législative. — R.
  2. On trouve cette lettre dans le Mercure de France, septembre 1762, p. 163. — R.
  3. Wagnière fait remarquer, avec raison, que le jugement que l’on porte