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Page:De Bachaumont - Mémoires secrets Tome 1 - 1762-1765 - Ravenel - Ed. Brissot-Thivars - 1830.djvu/129

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MÉMOIRES SECRETS

Le roQue par la gloire et les talens.
Le roToujours, aux rives de la Seine,
Le nom que vous portez, annonça le succès.
Dans des temps malheureux, de discorde et de haine,
Le roPlessis-Praslin battit Turenne :
LeVous faites plus, vous nous donnez la paix.

7. — On a donné hier Irène. Cette tragédie de M. Boitel est un roman mal tissu. Son Irène est la femme d’un Copronyme, empereur de Byzance, contemporain de Charlemagne. Elle se trouve exilée dans une île déserte, où toute la cour abonde successivement. On peut partir de cette absurdité pour juger quelle petite tête a enfanté un pareil drame ; il y a pourtant de l’adresse dans les trois premiers actes, ils sont filés ingénieusement ; les deux autres sont des fantômes estropiés d’une imagination en délire.

8. — M. l’abbé Mignot, conseiller au grand Conseil, vient d’essayer ses talens pour l’histoire par une Vie de l’impératrice Irène. On la trouve bien écrite, mais on pense qu’il eût pu choisir un sujet plus intéressant.

9. — Mademoiselle Clairon s’est mis dans la tête qu’Irène était une bonne tragédie, puisqu’elle l’avait trouvée telle, et qu’elle y jouait. En conséquence elle a cabalé pour lui faire avoir une seconde représentation. Elle a ameuté ses partisans, et la pièce a été applaudie à tout rompre, au moyen de quelques changemens. Elle avait donné le mot pour qu’on demandât l’auteur ; on l’a traîné fort humblement sur le théâtre. Ce spectacle, moins un triomphe qu’un supplice, a fait étrangement souffrir l’amour-propre de M. Boitel : il n’a osé sortir de sa contenance humiliée, et il s’en est retourné aussi honteux qu’il était venu.