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Page:De Bachaumont - Mémoires secrets Tome 1 - 1762-1765 - Ravenel - Ed. Brissot-Thivars - 1830.djvu/169

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MÉMOIRES SECRETS

a rendu les cent pistoles qu’elle avait touchées, et l’on s’attend incessamment à voir cette merveille.

23. — Le Socrate de M. de Sauvigny, après bien des contradictions, doit se jouer à la rentrée. On avait d’abord exigé qu’il supprimât une tirade contre Aristophane, comme désignant trop particulièrement le sieur Palissot. La marquise de Villeroi avait assuré l’auteur qu’il ne serait point représenté sans cela. Après bien des pourparlers, il a rayé à regret le morceau où ce méchant était particulièrement caractérisé[1].

24. — L’Anglais à Bordeaux a été joué à la cour. Le roi, la reine et la famille royale ont voulu voir l’auteur : en conséquence Favart s’y est rendu. Il a été accueilli avec beaucoup de bonté. Au moment où on l’a conduit chez la marquise, elle lisait un écrit de Marmontel, la Bergère des Alpes. Cette grande dame a exigé qu’il en fît une pièce, ce qui sera exécuté.

L’abbé de Voisenon recueille indirectement tous les éloges donnés à l’autre : il s’en défend avec la plus grande modestie ; mais l’esprit de la pièce est trop marqué à son type pour le méconnaître.

25. — On commence à répandre les bons mots des

  1. Voici ee passage qui n’a effectivement point été conservé dans la tragédie imprimée :

    Qu’importe que sur toi ce ténébreux cynique
    Verse les flots impurs de son fiel satirique :
    De quel front prétend-il, moraliste sans mœurs,
    Calomnier ta gloire et condamner les cœurs.
    Un jour la main du Temps par qui tout s’apprécie,
    Relève le grand homme et terrasse l’envie ;
    Du courroux d’Anytus lâche et vil instrument,
    Il aura cru, peut-être, échapper au néant.
    Il est des malheureux dont la plume incertaine
    yend indifféremment sa faveur et sa haine.

    — R.