Aller au contenu

Page:De Bachaumont - Mémoires secrets Tome 1 - 1762-1765 - Ravenel - Ed. Brissot-Thivars - 1830.djvu/172

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
151
MARS 1763

mille francs de pension à ce dernier et cent pistoles à l’abbé Coyer. Il en coûte toujours quelque chose pour déplaire aux princes.

31. — M. Dorat, en philosophe, s’est joint au public pour trouver sa pièce mauvaise[1] ; il a fait à cette occasion une Épître gentille. La voici ; elle s’adresse à un ami, M. de Pezai :


Au milieu des plus grands revers
On dit que le sage plaisante,
Et qu’il verrait sans épouvante
La ruine de l’univers.
J’en fais mon compliment au sage :
Cette héroïque fermeté
Est bien digne de notre hommage,
Je la respecte en vérité :
Mais jamais ce triste courage
Par moi ne peut être imité.
J’ai toute la faiblesse humaine :
Mon âme esclave de mes sens,
Ouvre toujours les deux battans
Au plaisir, ainsi qu’à la peine.
Ami, tu me vois consterné
D’avoir au grand jour de la scène
Risqué mon drame infortuné ;
Oui ma douleur est sans seconde,
Et cependant, on le sait bien,
La chute d’un drame n’est rien
Auprès de la chute du monde.
Je puis, dis-tu, me consoler
Entre les bras d’une maîtresse :
Exilé des bords du Permesse,
C’est à Paphos qu’il faut voler.
Ce ciel n’est point exempt d’orages,
Désormais à l’abri des vents

  1. v. 2 mars 1763, — R.