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Page:De Bachaumont - Mémoires secrets Tome 1 - 1762-1765 - Ravenel - Ed. Brissot-Thivars - 1830.djvu/180

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MAI 1763

2 Mai. — Quoique le Saül de M. de voltaire ne soit pas imprimé, les manuscrits s’en multiplient.

Ce drame est dans le goût, pour la forme constitutive, du François second du président Hénault : il embrasse une partie de la vie de Saül et tout le règne de David. Les actions ridicules ou cruelles de ces princes y sont rapprochées sous le jour le plus pittoresque. Si le but de l’auteur a été de prouver que le dernier surtout, si fort selon le cœur de Dieu, le prophète-roi, le saint prophète, était cependant coupable de toutes sortes d’abominations, il a réussi. Au reste, nul coloris étranger : c’est le simple historique de ces deux vies ; ce sont le style et les figures de l’Écriture-Sainte.

3. — Mademoiselle de Maisonneuve, petite-fille de la femme de chambre de mademoiselle Gaussin, celle dont on a déjà parlé[1], et dont l’abbé de Voisenon a décelé les talens, vient de débuter : elle est très-jeune, fort bien de figure ; elle a de la naïveté, de l’intelligence, et promet beaucoup ; elle a été très-bien accueillie aujourd’hui ; elle a joué dans la Gouvernante et dans Zenéide. Dans la première pièce, comme elle est tête à tête avec son amant, on vient l’avertir de se retirer : en fuyant elle est tombée dans la coulisse, et a laissé voir son derrière. Madame Bellecour, dite Gogo, soubrette, est venue très-modestement lui remettre ses juppes. Le tout s’est passé au contentement du public, qui a fort fêté le cul de l’actrice, et la modeste Gogo. La jeune personne n’a point été déconcertée, elle est rentrée peu après sur le théâtre. On lui débita plusieurs vers de suite, susceptibles d’allusion à ce qui venait de se passer ; le public l’a saisie

  1. V. 22 mars 1763. — Mademoiselle de Maisonneuve débuta sous le nom de Doligny qu’elle a illustré. — R.