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Page:De Bachaumont - Mémoires secrets Tome 1 - 1762-1765 - Ravenel - Ed. Brissot-Thivars - 1830.djvu/292

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AVRIL 1764

bien : lui d’insister et d’assurer qu’il ne voyait goutte, et le monde de rire, et l’astronome d’être hué.

2. — M. Dorat continue à employer ses revenus en belles impressions ornées de gravures. Il vient de nous donner, à ses frais, ce qu’il appelle le Pot pourri, Épître à qui l’on voudra. Cet ouvrage, qui n’a que le titre de singulier, est une description en vers d’un voyage que ce poète a fait l’année dernière à la terre de son ami Pezay. Cela est versifié agréablement, plus fort de mots que de choses. On sent qu’après le voyage de Chapelle, celui de M. de Pompignan, et tant de poésies légères qui existent sur de pareils sujets, on ne peut rien dire de bien neuf. À la suite est une Épître à M. Dorat par M. de Pezay : c’est l’auteur de Zélis au bain. On ne peut refuser à ce dernier le talent assez commun aujourd’hui de dire agréablement des riens, de ressasser tout ce qu’on a épuisé depuis long-temps sur le sentiment. Il célèbre avec raison son amitié pour M. Dorat, et finit par lui dire que « le hasard fait les frères, et la vertu fait les amis. »

3. — Depuis quelque temps la fureur d’écrire sur les matières de finance avait passé comme une maladie épidémique. Une Déclaration du Roi du 28 mars, enregistrée le 31 du même mois par la grand’chambre, semble chercher à ranimer cette rage, par les défenses de rien publier sur cet objet. On ne peut que rire d’une autorité aussi mal employée. On motive cette démarche sur la nécessité de réprimer les auteurs obscurs qui se servent d’un pareil prétexte pour répandre des calomnies et jeter l’alarme dans les esprits. La police, chargée en tout temps de veiller sur la librairie, suffisait pour arrêter les ouvrages imprimés avec permission. Quant aux autres, que peut y faire une défense aussi absurde ? On voit avec