Aller au contenu

Page:De Bachaumont - Mémoires secrets Tome 1 - 1762-1765 - Ravenel - Ed. Brissot-Thivars - 1830.djvu/384

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
363
FÉVRIER 1765

mer les mœurs d’un peuple corrompu. En général, cet auteur écrit faiblement et avec peu de coloris : il y a quelques morceaux d’enthousiasme.

10. — Il y a quatorze ans que M. Garrick, le plus grand acteur du théâtre de Londres, vint passer quelques jours à Paris : il vit jouer mademoiselle Clairon, et reconnut ce qu’elle devait être un jour. Il vient de faire faire un dessin par M. Gravelot, dans lequel mademoiselle Clairon est représentée avec tous les attributs de la Tragédie. Un de ses bras s’appuie sur une pile de livres : on y lit Corneille, Racine, Crébillon, Voltaire ; et Melpomène est à côté qui la couronne. Dans le haut du dessin on lit ces mots : Prophétie accomplie, et ces quatre vers au bas :

J’ai prédit que Clairon illustrerait la scène,
J’aEt mon esprit n’a point été déçu ;
J’ai pElle a couronné Melpomène ;
Melpomène lui rend ce qu’elle en a reçu.

Ces vers sont de M. Garrick.

Les enthousiastes de mademoiselle Clairon ont saisi avec avidité cette occasion de la célébrer : on a institué l’Ordre du Médaillon, et l’on a frappé des médailles représentant ce portrait, dont ils se sont décorés.

11. — M. le Normand d’Estioles, ayant épousé depuis quelque temps mademoiselle Rem, fille d’Opéra, dont il avait fait sa maîtresse, de fort mauvais plaisans ont ainsi joué sur le mot :

Pour réparer miseriam
Que Pompadour laisse à la France,
Son mari, plein de conscience,
Vient d’épouser Rem publicam.