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Page:De Sales - Introduction à la vie dévote, 1619, édition Boulenger, 1909.pdf/161

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les, mais elle avait plus de devoir à l’obéissance de ses supérieurs ; c’est pourquoi saint Jérôme avoue qu’elle était répréhensible en ce que, contre l’avis de son évêque, elle faisait des abstinences immodérées. Les Apôtres au contraire, commis pour prêcher l’Évangile et distribuer le pain céleste aux âmes, jugèrent extrêmement bien qu’ils eussent eu tort de s’incommoder en ce saint exercice pour pratiquer la vertu du soin des pauvres, quoique très excellente. Chaque vacation a besoin de pratiquer quelque spéciale vertu : autres sont les vertus d’un prélat, autres celles d’un prince, autres celles d’un soldat, autres celles d’une femme mariée, autres celles d’une veuve ; et bien que tous doivent avoir toutes les vertus, tous néanmoins ne les doivent pas également pratiquer, mais un chacun se doit particulièrement adonner à celles qui sont requises au genre de vie auquel il est appelé.

Entre les vertus qui ne regardent pas notre devoir particulier, il faut préférer les plus excellentes et non pas les plus apparentes. Les comètes paraissent pour l’ordinaire plus grandes que les étoiles et tiennent beaucoup plus de place à nos yeux ; elles ne sont pas néanmoins comparables ni en grandeur ni en qualité aux étoiles, et ne semblent grandes sinon parce qu’elles sont proches de nous et en un sujet plus grossier au prix des étoiles. Il y a de même certaines vertus lesquelles, pour être proches de nous, sensibles et, s’il faut ainsi dire, matérielles, sont grandement estimées et toujours préférées par le vulgaire : ainsi préfère-t-il communément l’aumône temporelle à la spirituelle, la haire, le jeûne, la nudité, la discipline et les mortifications du corps à la douceur, à la débonnaireté, à la modestie et autres mor-