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Page:De Sales - Introduction à la vie dévote, 1619, édition Boulenger, 1909.pdf/180

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et parfumés du prince ? Qu’gavons-nous de bon que nous n’ayons reçu ? et si nous l’avons reçu, pourquoi nous en voulons-nous enorgueillir ? Au contraire, la vive considération des grâces reçues nous rend humbles ; car la connaissance engendre la reconnaissance. Mais si voyant les grâces que Dieu nous a faites, quelque sorte de vanité nous venait chatouiller, le remède infaillible sera de recourir à la considération de nos ingratitudes, de nos imperfections, de nos misères : si nous considérons ce que nous avons fait quand Dieu n’a pas été avec nous, nous connaîtrons bien que ce que nous faisons quand il est avec nous n’est pas de notre façon ni de notre crû ; nous en jouirons voirement et nous en réjouirons parce que nous l’avons, mais nous en glorifierons Dieu seul, parce qu’il en est l’auteur. Ainsi la Sainte Vierge confesse que Dieu lui fait choses très grandes, mais ce n’est que pour s’en humilier et magnifier Dieu : « Mon âme, dit-elle, magnifie le Seigneur, parce qu’il m’a fait choses grandes».

Nous disons maintes fois que nous ne sommes rien, que nous sommes la misère même et l’ordure du monde ; mais nous serions bien marris qu’on nous prît au mot et que l’on nous publiât tels que nous disons. Au contraire, nous faisons semblant de fuir et de nous cacher, afin qu’on nous coure après et qu’on nous cherche ; nous faisons contenance de vouloir être les derniers et assis au bas bout de la table, mais c’est afin de passer plus avantageusement au haut bout. La vraie humilité ne fait pas semblant de l’être et ne dit guère de paroles d’humilité, car elle ne désire pas seulement de cacher les autres vertus, mais encore et principalement elle souhaite de se