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Page:De Sales - Introduction à la vie dévote, 1619, édition Boulenger, 1909.pdf/210

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prennent hors le mariage, ou même au mariage quand elles se prennent contre la règle du mariage. Pour le second, retranchez-vous tant qu’il vous sera possible des délectations inutiles et superflues, quoique loisibles et permises. Pour le troisième, n’attachez point votre affection aux plaisirs et voluptés qui sont commandées et ordonnées ; car bien qu’il faille pratiquer les délectations nécessaires, c’est-à-dire celles qui regardent la fin et institution du saint mariage, si ne faut-il pas pourtant y jamais attacher le cœur et l’esprit.

Au reste, chacun a grandement besoin de cette vertu. Ceux qui sont en viduité doivent avoir une chasteté courageuse qui ne méprise pas seulement les objets présents et futurs, mais qui résiste aux imaginations que les plaisirs loisiblement reçus au mariage peuvent produire en leurs esprits, qui pour cela sont plus tendres aux amorces déshonnêtes. Pour ce sujet, saint Augustin admire la pureté de son cher Alipius qui avait totalement oublié et méprisé les voluptés charnelles, lesquelles il avait néanmoins quelquefois expérimentées en sa jeunesse. Et de vrai, tandis que les fruits sont bien entiers ils peuvent être conservés, les uns sur la paille, les autres dedans le sable, et les autres en leur propre feuillage ; mais étant une fois entamés, il est presque impossible de les garder que par le miel et le sucre, en confiture : ainsi la chasteté qui n’est point encore blessée ni violée peut être gardée en plusieurs sortes, mais étant une fois entamée, rien ne la peut conserver qu’une excellente dévotion, laquelle, comme j’ai souvent dit, est le vrai miel et sucre des esprits.

Les vierges ont besoin d’une chasteté extrêmement