Aller au contenu

Page:De Sales - Introduction à la vie dévote, 1619, édition Boulenger, 1909.pdf/215

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

À ce propos, je vous présente le mot que l’ancien père Jean Cassien rapporte comme sorti de la bouche du grand saint Basile, qui, parlant de soi-même, dit un jour : « Je ne sais que c’est[1] que des femmes, et ne suis pourtant pas vierge ». Certes, la chasteté se peut perdre en autant de façons qu’il y a d’impudicités et lascivetés, lesquelles, selon qu’elles sont grandes ou petites, les unes l'affaiblissent, les autres la blessent et les autres la font tout à fait mourir. Il y a certaines privautés et passions indiscrètes, folâtres et sensuelles, qui à proprement parler ne violent pas la chasteté, et néanmoins elles l’affaiblissent, la rendent languissante et ternissent sa belle blancheur. Il y a d’autres privautés et passions, non seulement indiscrètes mais vicieuses, non seulement folâtres mais déshonnêtes, non seulement sensuelles mais charnelles ; et par celles-ci la chasteté est pour le moins fort blessée et intéressée. Je dis : pour le moins, parce qu’elle en meurt et périt du tout, quand les sottises et lascivetés donnent à la chair le dernier effet du plaisir voluptueux, ains alors la chasteté périt plus indignement, méchamment et malheureusement, que quand elle se perd par la fornication, voire par l’adultère et l’inceste ; car ces dernières espèces de vilenies ne sont que des péchés, mais les autres, comme dit Tertullien, au livre de la pudicité, sont des monstres d’iniquité et de péché. Or Cassianus ne croit pas, ni moi non plus, que saint Basile eût égard à tel déréglement quand il s’accuse de n’être pas vierge, car je pense qu’il ne disait cela que pour les

  1. Ce que c’est.