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Page:De Sales - Introduction à la vie dévote, 1619, édition Boulenger, 1909.pdf/230

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cher et semblables. J’appelle vertus frivoles certaines habilités et qualités vaines que les faibles esprits appellent vertus et perfections. Oyez parler la plupart des filles, des femmes et des jeunes gens, ils ne se feindront nullement de dire : un tel gentilhomme est fort vertueux, il a beaucoup de perfections, car il danse bien, il joue bien à toutes sortes de jeux, il s’habille bien, il chante bien, il cajole bien, il a bonne mine ; et les charlatans tiennent pour les plus vertueux d’entre eux ceux qui sont les plus grands bouffons. Or, comme tout cela regarde les sens, aussi les amitiés qui en proviennent s’appellent sensuelles, vaines et frivoles, et méritent plutôt le nom de folâtrerie que d’amitié. Ce sont ordinairement les amitiés des jeunes gens, qui se tiennent aux moustaches, aux cheveux, aux œillades, aux habits, à la morgue, à la babillerie : amitiés dignes de l’âge des amants, qui n’ont encore aucune vertu qu’en bourre ni nul jugement qu’en bouton ; aussi telles amitiés ne sont que passagères et fondent comme la neige au soleil.


CHAPITRE XVIII

DES AMOURETTES


Quand ces amitiés folâtres se pratiquent entre gens de divers sexe, et sans prétention du mariage, elles s’appellent amourettes, car n’étant que certains avortons, ou plutôt fantômes d’amitié, elles ne peuvent porter le nom ni d’amitié, ni d’amour, pour leur incomparable vanité