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Page:De Sales - Introduction à la vie dévote, 1619, édition Boulenger, 1909.pdf/27

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cher le secret de bien vivre ; là qu’elle apprendra l’usage qu’il faut faire des bons et des mauvais jours. Ses joies furent courtes et clairsemées ; la naissance d’une fille, celle d’un second fils ; des retours heureux et inattendus de la fortune, comme cette nomination, qui en élevant Monsieur de Charmoisy au grade de grand-maître de l’artillerie, le tire de l’obscurité où le caprice et l’ingratitude du duc de Nemours l’avaient relégué ; plus tard le mariage de ses deux enfants ; ce furent là ses jours de fête, et ce ne fut guère. Les jours de deuil furent plus nombreux : Philothée connut en vérité toutes les formes de l’épreuve. Son guide l’en avait avertie ; « Préparez-vous…, Philothée, à souffrir beaucoup de grandes afflictions pour Notre Seigneur, et même le martyre ; résolvez-vous de lui donner tout ce qui vous est de plus précieux, s’il lui plaisait de le prendre : père, mère, mari…, enfants »[1]. Philothée aura jusqu’au bout ce courage. Elle voit mourir de ses yeux son dernier-né, celui qu’elle nommait « le petit François », le filleul de Monsieur de Genève ; à la fin de 1618, elle apprend, à l’heure même où on désespérait de sa propre vie, que Monsieur de Charmoisy venait d’être foudroyé par un mal soudain, à Chambéry, d’où il se disposait, sur l’ordre de son maître, à partir pour Paris. Heureusement, comme disait un jour Saint François de Sales dans une de ses lettres[2], « heureusement nous serons bientôt tous réunis. Nous allons incessamment et tirons pays du côté où sont nos trépassés ». Mais le déchirement fut cruel ; Madame de

  1. Introd., III, 35.
  2. 1er novembre 1614.