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Page:De Sales - Introduction à la vie dévote, 1619, édition Boulenger, 1909.pdf/304

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blement conjoint avec la pudicité et honnêteté, conservez jalousement votre gloire et ne permettez qu’aucune sorte de dissolution ternisse la blancheur de votre réputation. Craignez toutes sortes d’attaques, pour petites qu’elles soient ; ne permettez jamais aucune muguetterie autour de vous. Quiconque vient louer votre beauté et votre grâce, vous doit être suspect ; car quiconque loue une marchandise qu’il ne peut acheter, il est pour l’ordinaire grandement tenté de la dérober. Mais si à votre louange quelqu’un ajoute le mépris de votre mari, il vous offense infiniment ; car la chose est claire, que non seulement il vous veut perdre, mais vous tient déjà pour demi perdue, puisque la moitié du marché est faite avec le second marchand, quand on est dégoûté du premier. Les dames tant anciennes que modernes ont accoutumé de pendre des perles en nombre à leurs oreilles, pour le plaisir, dit Pline, qu’elles ont à les sentir grilloter, s’entretouchant l’une l’autre. Mais quant à moi, qui sais que le grand ami de Dieu, Isaac, envoya des pendants d’oreilles pour les premières arrhes de ses amours à la chaste Rébecca, je crois que cet ornement mystique signifie que la première chose qu’un mari doit avoir d’une femme, et que la femme lui doit fidèlement garder, c’est l’oreille, afin que nul langage ou bruit n’y puisse entrer, sinon le doux et amiable grillotis des paroles chastes et pudiques, qui sont les perles orientales de l’Évangile : car il se faut toujours ressouvenir que l’on empoisonne les âmes par l’oreille, comme le corps parla bouche.

L’amour et la fidélité, jointes ensemble, engendrent toujours la privauté et confiance ; c’est pourquoi les saints et