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Page:De Sales - Introduction à la vie dévote, 1619, édition Boulenger, 1909.pdf/316

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veuve en viduité, elle en aura peut-être la louange, mais non pas certes devant Dieu, puisque devant Dieu, rien ne peut avoir une véritable louange que ce qui est fait pour Dieu.

3. Il faut de plus que la veuve, pour être vraiment veuve, soit séparée et volontairement destituée des contentements profanes. « La veuve qui vit en délices, dit saint Paul, est morte en vivant ». Vouloir être veuve et se plaire néanmoins d’être muguetée, caressée, cajolée ; se vouloir trouver aux bals, aux danses et aux festins ; vouloir être parfumée, attifée et mignardée, c’est être une veuve vivante quant au corps, mais morte quant l’âme. Qu’importe-t-il, je vous prie, que l’enseigne du logis d’Adonis et de l’amour profane soit faite d’aigrettes blanches perchées en guise de panaches, ou d’un crêpe étendu en guise de rets tout autour du visage ? ains souvent le noir est mis avec avantage de vanité sur le blanc, pour en rehausser la couleur. La veuve, ayant fait essai de la façon avec laquelle les femmes peuvent plaire aux hommes, jette de plus dangereuses amorces dedans leurs esprits. La veuve donc qui vit en ces folles délices, vivante est morte, et n’est à proprement parler qu’une idole de viduité.

« Le temps de retrancher est venu, la voix de la tourterelle a été ouïe en notre terre », dit le Cantique. Le retranchement des superfluités mondaines est requis à quiconque veut vivre pieusement ; mais il est surtout nécessaire à la vraie veuve qui, comme une chaste tourterelle, vient tout fraîchement de pleurer, gémir et lamenter la perte de son mari. Quand Noémi revint de Moab en Bethléem, les femmes de la ville qui l’avaient connue au com-