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Page:De Sales - Introduction à la vie dévote, 1619, édition Boulenger, 1909.pdf/379

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grandes résolutions, car ce fut en la fleur de votre âge. Ah ! quel bonheur d’apprendre tôt, ce que nous ne pouvons savoir que trop tard ! Saint Augustin, ayant été tiré à l’âge de trente ans, s’écriait : « O ancienne Beauté, comme t’ai-je si tard connue ? Hélas ! je te voyais et ne te considérais point ». Et vous pourrez bien dire : « O douceur ancienne, pourquoi ne t’ai-je plutôt savourée ? » Hélas ! néanmoins, encore ne le méritiez-vous pas alors ; et partant, reconnaissant quelle grâce Dieu vous a faite, de vous attirer en votre jeunesse, dites avec David : « O mon Dieu, vous m’avez éclairée et touchée dès ma jeunesse, et jusques à jamais j’annoncerai votre miséricorde ». Que si ç’a été en votre vieillesse, hélas ! Philothée, quelle grâce, qu’après avoir ainsi abusé des années précédentes. Dieu vous ait appelée avant la mort, et qu’il ait arrêté la course de votre misère au temps auquel, si elle eût continué, vous étiez éternellement misérable !

Considérez les effets de cette vocation : vous trouverez, je pense, en vous de bons changements, comparant ce que vous êtes avec ce que vous étiez. Ne prenez-vous point à bonheur de savoir parler à Dieu par l’oraison, d’avoir affection à le vouloir aimer, d’avoir accoisé et pacifié beaucoup de passions qui vous inquiétaient, d’avoir évité plusieurs péchés et embarrassements de conscience, et enfin, d avoir si souvent communié de plus que vous n’eussiez pas fait, vous unissant à cette souveraine source de grâces éternelles ? Ah ! que ces grâces sont grandes ! il faut, ma Philothée, les peser au poids du sanctuaire. C’est la main dextre de Dieu qui a fait tout cela. « La bonne main de Dieu, dit David, a fait vertu ; sa dextre m’a relevé. Ah ! je ne mourrai pas, mais je vivrai