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Page:De Sales - Introduction à la vie dévote, 1619, édition Boulenger, 1909.pdf/57

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leur purgation, se tenant pour parfaites avant presque d’être faites, en se mettant au vol sans ailes ? O Philothée, qu’elles sont en grand péril de rechoir, pour s’être trop tôt ôtées d’entre les mains du médecin ! Ah ! ne vous levez pas « avant que la lumière soit arrivée, dit le Prophète, levez-vous après que vous aurez été assis » ; et lui-même pratiquant cette leçon et ayant été déjà lavé et nettoyé, demande de l’être derechef.

L’exercice de la purgation de l’âme ne se peut ni doit finir qu’avec notre vie : ne nous troublons donc point de nos imperfections, car notre perfection consiste à les combattre, et nous ne saurions les combattre sans les voir, ni les vaincre sans les rencontrer. Notre victoire ne gît pas à ne les sentir point, mais à ne point leur consentir ; mais ce n’est point leur consentir que d’en être incommodé. Il faut bien que pour l’exercice de notre humilité, quelquefois nous soyons blessés en cette bataille spirituelle ; néanmoins nous ne sommes jamais vaincus sinon lorsque nous avons perdu ou la vie ou le courage. Or, les imperfections et péchés véniels ne nous sauraient ôter la vie spirituelle, car elle ne se perd que par le péché mortel ; il reste donc seulement qu’elles ne nous fassent point perdre le courage : « Délivre-moi, Seigneur, disait David, de la couardise et découragement ». C’est une heureuse condition pour nous en cette guerre, que nous soyons toujours vainqueurs, pourvu que nous voulions combattre.