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Page:De Sales - Introduction à la vie dévote, 1619, édition Boulenger, 1909.pdf/97

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chose de se plaire à mentir et d’être affectionné à cette sorte de péché.

Et je dis maintenant qu’il faut purger son âme de toutes les affections qu’elle a aux péchés véniels, c’est-à-dire qu’il ne faut point nourrir volontairement la volonté de continuer et persévérer en aucune sorte de péché véniel ; car aussi serait-ce une lâcheté trop grande de vouloir, tout à notre escient, garder en notre conscience une chose si déplaisante à Dieu comme est la volonté de lui vouloir déplaire. Le péché véniel, pour petit qu’il soit, déplaît à Dieu, bien qu’il ne lui déplaise pas tant que pour icelui il nous veuille damner ou perdre. Que si le péché véniel lui déplaît, la volonté et l’affection que l’on a au péché véniel n’est autre chose qu’une résolution de vouloir déplaire à sa divine Majesté. Est-il bien possible qu’une âme bien née veuille non seulement déplaire à son Dieu, mais affectionner de lui déplaire ?

Ces affections, Philothée, sont directement contraires à la dévotion, comme les affections au péché mortel le sont à la charité : elles alanguissent les forces de l’esprit, empêchent les consolations divines, ouvrent la porte aux tentations ; et bien qu’elles ne tuent pas l’âme, elles la rendent extrêmement malade. « Les mouches mourantes, dit le Sage, perdent et gâtent la suavité de l’onguent » : il veut dire que les mouches, ne s’arrêtant guère sur l’onguent, mais le mangeant en passant, ne gâtent que ce qu’elles prennent, le reste demeurant en son entier ; mais quand elles meurent emmi l’onguent, elles lui ôtent son prix et le mettent à dédain. Et de même, les péchés véniels, arrivant en une âme dévote et ne s’y arrêtant pas longtemps, ne l’endommagent pas beaucoup ; mais