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Page:De Sales - Introduction à la vie dévote, Curet, 1810.djvu/213

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dispositions intérieures, pensent être humbles et débonnaires, et ne sont rien moins ? Et cela se connoit, lorsque, nonobstant cette humilité extérieure et cette douceur cérémonieuse, on les voit s’élever avec une chaleur et un orgueil incroyable, sur une légère injure qu’on leur aura faite, ou sur la moindre parole qu’on leur aura dit de travers.

Quand l’humilité est bien réelle et la douceur sincère, elles sont à l’âme un excellent préservatif contre l’enflure d’esprit et l’ardeur du cœur, que les peines qu’on nous fait ont coutume d’y exciter ; comme l’on dit que ceux qui ont été piqués ou mordus par une vipère, n’enflent jamais quand ils ont pris de ce préservatif, qu’on appelle vulgairement la grâce de saint Paul. Mais si, ayant été piqué par la médisance, qui a la langue de serpent, notre esprit s’enfle d’orgueil et notre cœur s’enflamme, n’en doutons pas, c’est un signe évident que notre humilité et notre douceur ne sont ni véritables, ni sincères, mais artificieuses et apparentes.

Le saint et illustre Patriarche Joseph, renvoyant ses frères d’Égypte en la maison de son père, ne leur donna que cet avis : Ne vous fâchez point en chemin. Je vous le dis aussi, Philothée, cette vie n’est qu’un voyage que nous avons à faire pour aller au Ciel : ne nous fâchons donc point en chemin les uns contre les autres ; mar-